Frank Margerin, Dans les petits papiers de Margerin
Robinson, Hachette Livre,
Paris, 2024.
Comment mieux entrer dans l’intimité d’un auteur, et surtout
d’un auteur de BD, qu’en se plongeant dans ses carnets de croquis ? Cette
étape préparatoire aux œuvres définitives fait état de la réflexion et des
techniques de travail propres à chaque artiste.
Il en est ainsi de ce très beau recueil qui nous fait entrer
Dans les petits papiers de Margerin. L’auteur qu’on ne présente plus livre ici
des centaines de feuilles griffonnées de silhouettes et d’esquisses de ses
principaux personnages : Lucien, le rockeur à la banane gominée, Manu et
Momo, le coursier maghrébin qui parcourent les rues parisiennes sur son scooter.
Sur papier blanc ou sur feuilles à petits carreaux, sur des
carnets publicitaires (Maif) ou de croquis, sont jetées de façon nerveuse les idées des
futures planches des bandes dessinées de Margerin. Elles sont régulièrement accompagnées
de textes raturés, de remarques et de petits bouts de scénarios.
L’ouvrage est chapitré selon les passions et les intérêts de
l’auteur : la bécane, la musique, le sport et surtout un amour de la vie
quotidienne. C’est dans cette vie de tous les jours que sont a[e]ncrées toutes
les histoires de ses héros ordinaires. Chacun des chapitres est introduit par Frank
Margerin qui exprime son point de vue sur les sujets traités.
Lire Margerin, c’est s’immerger dans la société des années
1970-1980, se plonger dans l’ambiance des milieux populaires dans lesquels le
lecteur ne peut que se reconnaitre. Les histoires se déroulent au bas de la rue,
dans le troquet du coin, dans la salle de répèt du petit groupe de rock local.
Lire Margerin c’est retourner dans une France insouciante et qui osait, dans
laquelle les espoirs et les possibilités n’étaient pas entravés par des
politiques sécuritaires et les esprits n’étaient pas encore sclérosés et abrutis
par les réseaux sociaux. Les jeunes, et les moins jeunes, discutaient entre eux
et n’étaient pas rivés sur leur portable. Le loubard en blouson noir du
quartier était en rébellion contre les injustices de ce monde et non contre son
voisin.
C’est bien évidemment de Lucien qu’on parlera plus dans ce
livre. Le héros évolue au fil des pages, gagne en maturité et s’assagit en
fondant une famille. Lucien, incarnation dessinée peut-être de son auteur, est
devenu père de famille et transmet ses passions à sa progéniture, devenue elle
aussi personnage clef des récits plus récents.
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