samedi 10 juin 2023

Catherine Bréchignac, Retour vers l’obscurantisme, Le cherche midi, Paris, 2022.

 


Catherine Bréchignac, Retour vers l’obscurantisme,
Le cherche midi,
Paris, 2022.
 

Les théories du complot foisonnent, les crédules qui pensent que la Terre est plate sont de plus en plus nombreux, les fake news sont les « infos » qui font le plus le buzz sur la toile… Nous sommes à une époque de post-pandémie où le moindre « gourou » est capable de manipuler sans aucun frein des millions de personnes. Et pourtant, jamais les sciences n’ont autant progressé que ces dernières années…

Comment est-il possible que, malgré l’évidence de certains faits scientifiquement ou historiquement prouvés, il subsiste une frange de plus en plus importante de la population qui les remet en cause ? C’est la question que se pose Catherine Bréchignac, membre de l’Académie des technologies et de l’Académie des sciences et ancienne directrice générale et présidente du CNRS. Mais ce qui intrigue certainement encore plus la chercheuse, c’est le fait qu’en France et dans le monde, après des siècles de lutte pour les droits et les libertés, on assiste à un retour à l’obscurantisme, une idéologie visant à refuser tous les progrès.

Pour tenter de répondre à ces interrogations, on suit Agil, un personnage fictif, presque naïf qui s’interroge sans cesse et qui trouve les réponses en retraçant l’histoire des sciences et des progrès techniques basiques tels que le feu et l’électricité par exemple. Il découvre qu’au moment de leur invention, la plupart des progrès ont fait peur et ont suscité des craintes qui ont poussé les Hommes à s’en méfier pendant un certain temps avant que leur usage n’en devienne commun.

Mais notre époque, à la différence du passé, est celle des réseaux sociaux qui sont devenus de puissants vecteurs de transmission des peurs de masse. Il suffit qu’un manipulateur y instille une nouvelle théorie, sous couvert d’un faux raisonnement, pour que les masses s’en saisissent et y voient la volonté de quelques groupes imaginaires de dominer le monde. Et quand vient s’y greffer en plus la superstition, l’ensemble devient presque incontrôlable et il n’est plus possible de démontrer que ces mensonges ne reposent que sur des erreurs bien souvent commises volontairement.

Pourtant la science devrait rassurer. Elle est aujourd’hui capable de trouver des remèdes très rapidement à des maladies, elle se nourrit du doute pour avancer, car le scientifique se questionne en permanence pour aller encore plus loin. Elle est là justement pour sortir l’Homme de l’obscurantisme, comme l’ont voulu, en leur temps, les Lumières.

Comment faire pour sortir l’Homme de ces peurs irraisonnées et empêcher qu’il ne soit soumis aux manipulateurs de toutes sortes ? L’éducation et l’enseignement sont les remèdes contre ces dérives. Mais encore faut-il que les enseignants se rendent compte qu’ils ne sont plus simplement des transmetteurs de connaissances (internet fait le boulot), mais qu’ils doivent désormais se positionner en régulateurs et en modérateurs, afin de permettre aux jeunes à repérer les fausses informations et les idéologues en tout genre et qu’ils puissent acquérir l’esprit critique qui leur permettra d’élaborer des jugements éclairés.

A l’heure où tout le monde dispose d’un smartphone, ce sont les compétences du 21e siècle qui devront constituer l’enjeu de l’école de demain.  


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