jeudi 3 janvier 2019

Pat Mills, Joe Colquhoun, La Grande Guerre de Charlie. 17 octobre 1916-21 février 1917. Vol. 3 Delirium, 360 Media Perspective-Editions çà et là, Nogent-sur-Marne, Bussy-Saint-Georges, 2012.




Pat Mills, Joe Colquhoun, La Grande Guerre de Charlie. 17 octobre 1916-21 février 1917. Vol. 3
Delirium, 360 Media Perspective-Editions çà et là,
Nogent-sur-Marne, Bussy-Saint-Georges, 2012.

Ce troisième volume de la série retraçant l'itinéraire de Charlie Bourne dans la Première Guerre mondiale marque un véritable tournant par rapport aux deux précédents tomes. Il est le reflet sublime de la définition de ce qu'est la "guerre totale" magistralement définie par Jean-Vincent Holeindre dans son article paru dans la tout récente Histoire de la guerre de XIXème siècle à nos jours.

"Guerre totale" tout d'abord par la volonté des belligérants d'anéantir leurs adversaires. On avait fermé le deuxième tome des aventures de Charlie sur le début de l'Opération Wotan, menée par l'atroce "Escadron du jugement dernier" allemand contre la petite troupe de Charlie bloquée dans quelques marmites du front de la Somme. Les auteurs nous plongent cette fois dans la sauvagerie de cet escadron qui n'hésite pas à utiliser tous les moyens, mêmes les plus inhumains pour écraser leurs ennemis, comme par exemple ligoter certains de leurs prisonniers à des poteaux au dessus de leurs tranchées pour servir de boucliers humains. Mais dans cette histoire, les Anglais ne sont pas en reste dans les exactions, les auteurs ayant de souci de montrer comment de simples hommes peuvent devenir des tueurs déshumanisés quand leur propre vie est en danger ou quand il s'agit de se faire bien voir par l'Etat major.

"Guerre totale" ensuite dans la mesure où ce troisième tome fait intervenir pour la première fois les civils dans le conflit, exposant ainsi la mobilisation de toute la société dans l'effort de guerre. On y voit les familles à l'arrière recevoir les nouvelles tragiques du front, avec la crainte du facteur, oiseau de mauvaise augure, apportant avec une déconcertante normalité, l'annonce de la mort d'un proche. On y trouve aussi le retour provisoire des blessés et l'incompréhension, voire le conflit entre eux et ceux qui ne connaissent pas les horreurs du front. On met en scène les femmes dans les usines en train de fabriquer les armes, sous les bombardements de l'aviation.

"Guerre totale" enfin car effectivement, il est question pour la première fois d'aviation, et plus généralement de nouveaux types d'armes utilisés allégrement d'un coté comme de l'autre pour faire le plus de victimes possibles: gaz de combat, armes chimiques et bactériologiques (certes un simple élevage de rats, mais c'est un début…), Zeppelin et aviation, tanks et autres blindés. Les morts se comptent par milliers. Les blessés par dizaines de milliers. 

Le caractère un peu grotesque des débuts de Charlie dans la guerre a disparu. Celui-ci montre beaucoup plus de maturité, il pense et réfléchit, critique ses supérieurs et cette guerre en générale qu'il exècre de plus en plus alors qu'il était volontaire pour partir et qu'il avait tout fait, jusqu'à trafiquer son âge, pour être engagé dans l'armée britannique. ce qui l'importe désormais c'est de sauver sa vie et celle de ses camarades. On ne se bat plus pour son pays, ni pour les gradés, hommes politiques, ou autres profiteurs de guerre, mais simplement pour vivre une heure de plus, une journée de plus...

Les dessin et la mise en page sont toujours aussi fantastiques. La couleur apparait dans les premières pages de chaque épisode et cette fois encore, l'album se termine par des explications historiques très précieuses fournies par les auteurs qui justifient chacune de leurs planches. C'est tout simplement magistral. 

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